Epreuve terminée, le temps du compte-rendu est venu, on va essayer de faire assez synthétique
Avec les dernières annonces météo, je me déleste de le veste chaude au profit d'un maillot manches longues (delta de 110 grs), je laisse aussi les gants du même acabit (gain de 130 grs), le dentifrice (18 grs) et 2 barres de ravitos (90 grs). Je garde volontairement chaussettes étanches et casquette goretex en cas d'orages, et involontairement la lessive (52 grs), oubliée dans le fond de la sacoche. Avec 350 grs de moins, sans prendre de risques, je pars le cœur léger
.
En ce vendredi matin, une petite appréhension mêlée à de l'impatience est là. Petite parenthèse organisation, côté accueil et check-in du jeudi soir, nickel avec David et Louis, souriants et serviables. Côté fonctionnement, une fois la trace gpx chargée et suivie, et la balise active et installée, lors du parcours il faudra valider les 10 CP en... faisant des selfies et en les partageant sur le groupe What's app et/ou Instagram. Malin financièrement, mais qui ne colle pas forcément à l'idée de chacun, et RIP la vie privée.
Départ 6h vendredi après une nuit tranquille et une dose de "crème sport dej" home made, recette Alain Roche. Ravie de partir plus légère, grâce à vous, on démarre par le col de la croix Saint-Robert. Je suis "à domicile" et je connais chaque virage de cette ascension, je pars tranquillement. Dans ma tête du moins, car je me sens bien et je me répète de penser à la difficulté du jour : le Puy Mary. En quelques 13 kms, les crevaisons s'enchainent déjà, 3 sont sur le bas côté, c'est que le gravier auvergnat est hostile
On bascule vers le Mont Dore, la Bourboule, au km24 un sanglier traverse la route à un cinquantaine de mètres de moi
et je croise les doigts pour ne pas en trouver d'autres dans ce faux plat descendant. Après le col qui aura échauffé les cuisses, on enchaîne dans les plus beaux décors du secteur, je découvre des petites routes insoupçonnées sur lesquelles je reviendrai. La traversée de Condat me révèle l'existence de pas mal de commerces, bar / boulangerie / superette, mais je juge qu'il est trop tôt pour s'arrêter car je sais qu'au km94 à Riom-Es-Montagne, il y en aura au moins autant. Point qui sera rejoint par la D678, route qui se rapproche d'une belle nationale, et qui n'est pas la plus agréable du monde à vélo. Elle me paraît in-ter-mi-na-ble, d'autant plus que depuis le km54, les sensations dans les jambes ne sont pas top
, mais ça passera.
Première pause ravito à Riom-Es-Montagne donc, où après le selfie devant l'emblématique gare, je trouve une boulangerie qui vend du salé (pizza immédiate, quiche pour le goûter). Le temps de manger ma part de pizza, je croiserai là un habitué des ultras qui roule sur un Kona en acier soudo-brasé du plus bel effet, et on se recroisera plus tard dans la journée. La route se poursuit, on entre dans le Cantal et ses paysages majestueux
... Depuis le départ je roule solo, et cela me va très bien, je ne suis pas super loquace sur les trucs organisés et plutôt dans ma bulle en roulant. Après le repas, les 2h suivantes sont "easy", les bosses s'enchaînent et le soleil est omniprésent. Malgré l'heure qui tourne les orages annoncés ne pointent pas le bout de leur nez et les degrés Celsius grimpent. L'ascension du col de Néronne est compliquée
, je mets du temps à comprendre que j'ai un peu tardé à m'alimenter depuis Riom, que j'aurais dû boire un peu plus également, et surtout que j'aurais dû garder un bidon d'eau claire pour m'arroser (j'ai de la boisson Malto/BCAA). Car je lorgne sévèrement sur l'eau qui perle de la roche montagneuse sur ma gauche pour y plonger la tête si cela était possible
. C'est le stop au km144, sur le muret à seulement 3 kms du sommet, car je trouve enfin un bout d'ombre sous le seul arbre vu depuis que j'en cherche un. Je m'y arrête pour reprendre mes esprits, car je suis en train de prendre un coup de chaud et en perd la lucidité, les M&M's et les qqs degrés de gagner à l'ombre sont salvateurs, car le compteur indique 39°C. Je repars et j'ai la bonne surprise de trouver un bar au commet du col, qui me permettra de recharger en eau claire un bidon, prendre un coca et manger ma quiche gardée précieusement du matin.
Pendant ce moment de dégustation, monsieur en Kona arrive, il s'était arrêté ailleurs mais avait eu un coup de moins bien également, alors qu'il était reparti avant moi en roulant à meilleur rythme (de retour dernièrement de la desertus bikus, pardon). Nous ferons la descente ensemble et il reprendra son rythme dans le col suivant, l'avoir en visuel me donnera un point de mire à un moment sans me mettre dans le rouge pour autant.
Mes esprits complètement retrouvés, je me projette dans le Puy Mary
. Cette ascension me tient autant à cœur qu'elle m'impressionne, et l'attaquer avec plus de 150 kms dans les pattes me paraît un défi en soit. Je m'en fais une montagne, je le sens, alors je me focalise sur la descente pour m'amuser et me détendre. Mon pote le compteur Garmin m'annonce la pente
, je sais que la difficulté est à la fin, alors je gère autant que je peux, et me voilà dans les 2 derniers kilomètres, le % augmente encore et je vois la route quasi droite s'élever devant... Ils n'ont jamais inventé les épingles ou quoi ici ?! Je suis "tout à gauche", j'ai mal, et pour la première fois de ma vie, je commence essayer de zigzaguer pour amoindrir la facture de l'inclinaison
... Moyennement convaincue, et n'oubliant pas la circulation, je le reprends en frontal finalement, concentrée sur le pédalage mais en comptant les 0,1 km par 0,1 km et en me parlant. Quand j'entends un bruit assez strident qui se rapproche, je me demande si je n'ai pas un nouveau coup de chaud et que je commence à halluciner. Mais non, c'est un drone de l'orga qui prend des images, et qui me suivra jusqu'au passage de la seule épingle de ce col...
Arrivée en haut, l'émotion est là, car c'était un de mes objectifs du parcours et je m'étais mis la pression - inutilement probablement. La descente se fait sur un bitume propre et neuf, avec un décor à couper le souffle de tous les côtés, une vraie régalade. A la traversée du village de Mandaille, je réalise que la trace fait passer par le col du Perthus, court de 4,5 kms mais à 8.6% de moyenne, qui me fera exploser les cuisses pour 2 raisons. 1/ Son Profil, 2/ Charme local, j'ai suivi un troupeau de Salers sur 500m environ, où là je devais zigzager derrière elles pour garder l'équilibre avec la sensation "grosses cuisses", un régal.
Mon point de chute (hôtel) du jour sera à St-Jacques-Des-Blats, au km184, après 3991m de d+. Mais après une bonne descente en tournant les jambes, les sensations n'étaient pas mauvaises, peut-être aurais-je dû pousser plus loin ? A voir, c'était une première, c'était un choix prudent. Profitant d'un repas à l'hôtel purement local : truffade (que je n'ai pas réussi à finir) et cornet de Murat, cette nuit je me suis au final arrêtée "longtemps" car j'ai fait une vraie nuit de sommeil. J'ai également approfondi la technique de lavage/séchage du cuissard en mode minimaliste. Au final il ne me manquait rien, c'était parfait.
Samedi, départ 5h30 pour rouler de nuit, au frais, attaquer la montée du Lioran tranquille, et profiter du lever de soleil sur la station.
La montée du Lioran se fait déjà avec plus de 10°C au compteur, mais typique de cette région, lors de la bascule vers Murat je plonge dans le brouillard et perds 5°C, sans en souffrir, le choix du matériel est bon (sous-maillot, maillot Mérinos, gilet coupe-vent et manchettes). Les paysages du Cantal sont toujours hypnotisants, encore plus dans la brume matinale. Comme dans le Puy-de-Dôme, je découvre des petites routes sur lesquelles je reviendrai.
Ma halte à la boulangerie de Neussargues ne me permettra pas de trouver de produits salés, alors je me laisserai tenter par chocolatine / chausson aux pommes / coca, mais que je garderai pour plus tard car il est encore tôt. Au moment où je repars je croise un participant de la trace Gravel, ça permet d'échanger quelques mots d'encouragements de bon matin. Les bosses s'enchaînent mais les % sont soft comparés à la veille, à tel point que dans du 4% j'ai l'impression de pouvoir arrêter de pédaler, mais en fait non quand même pas. Car le cardio est collé, très collé et archi collé: j'ai bien perdu 20 puls depuis la veille, si ce n'est pas 25, ce qui me perturbe un peu car je ne sais pas comment trop géré l'effort, bref. Passage au lac du Pêcher, Allanche, Vèze (avec sa fontaine d'eau potable), tout s'enchaîne bien tant que je garde une bonne cadence ni trop faible ni trop élevée.
Je ferai une pause du côté du Luguet dans un petit bar inespéré, le patron m'offre une pomme au passage et je discute avec la table d'à côté où 2 femmes attendent le passage de leurs maris engagés sur la trace gravel, elles m'avaient vu arriver sur le tracking gps. La bienveillance est vraiment de mise ces derniers jours, et ça fait du bien après 2 ans de chamboulement dans nos relations sociales. Le temps que mon café arrive, le participant gravel en Trek vu à la boulangerie arrive. L'occasion d'échanger nos expériences, et qu'il me fasse part de son regret du manque d'orga, lui plus habitués aux triathlons et ironman (c'est sûr, en comparaison, il n y'a rien : tu charges la trace, tu roules, et tu te fais des selfies). Il reprendra la trace gravel et j'attaquerai la descente en palier vers Ardes/Couze où l'arrivée se fait par le zoo et les girafes. S'ensuit une longue (15 kms), mais progressive, montée jusqu'au col de Volpilière, durant laquelle je reprendrai 2 participants bien plus entamés que moi.
Enrichie de mon expérience de la veille, je me suis gardée un bidon d'eau claire, et clairement l'arrosage régulier des dos/nuque/avant-bras me permettra de bien vivre les dernières bosses du parcours. Canette de coca consommée au sommet du col, remontée à bloc pour solder les 40 kms derniers kilomètres. Après une longue descente assez rapide en préambule de la dernière montée de 4kms avec quelques bons % sur 1 km, elle a fait mal à ce stade du parcours.
Après 156 kms de ce "jour 2" et 2921m de d+, je rallierai l'arrivée vers 16h, après avoir eu un regain d'énergie dans les 10 derniers kilomètres et l'envie de continuer en étant arrivée.
Petit point organisation, j'ai eu la chance de tomber sur un organisateur en arrivant au lac, car sinon c'était le no man's land (au milieu des touristes à la plage)... Pas de fléchage, pas d'indications, pas moyen de savoir où rendre la balise exactement.
Les enseignements :
- c'est fait, et je ne suis pas en PLS,
- j'avais emmené beaucoup trop à manger (j'ai consommé à peine la moitié)
- j'aurais pu pousser jusqu'à Murat, pour rouler plus le jour 1, et dormir moins
- toujours garder un bidon d'eau claire quand il fait chaud
- ma sacoche de selle de 10L est trop grande, car trop peu remplie c'est galère à bien rouler et ça touche les cuisses (ce qui n'est pas le cas quand elle a 5/6L de matos)
- les pneus en 35mm c'est trop large pour ce parcours, 28 ou max 30 en pneus route costauds (genre Fusion) ça le faisait bien en étant plus légers avoir un meilleur rendement
- je dois me trouver des nouveaux repères physiques quand je suis fatiguée pour réussir à gérer
Côté mécanique, rien à signaler, pas de surprises, pas de casses. Après ces 2 bonnes journées de vélos, aucune douleurs de posture à proprement parlé, même si j'ai touché du bout des doigts l'intérêt des prolongateurs pour les spécialistes de l'ultra-distance. Est-ce que je recommencerais ? Probablement oui, mais pas sous le même format ou pas avec la même gestion (nuit & co).
En tout cas, vos différents conseils m'ont bien été profitables, concrètement, donc merci encore !